L'Actualité juridique Janvier 2023
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L'édito
LE SON DU COR
Le COR, Conseil d’Orientation des retraites, a été créé en 2000 auprès du Premier ministre afin d’engager « un processus concerté de réforme respectant la diversité et l’identité des régimes de retraites ». Composé de représentants des assemblées parlementaires, des organisations professionnelles, syndicales, familiales et sociales les plus représentatives et des départements ministériels intéressés, et de personnalités qualifiées, le COR se présente comme une structure pluraliste et permanente qui n’est ni lieu de décision, ni lieu de négociation. Il assure le suivi et l’expertise concertée du système d’assurance vieillesse et fait des propositions. Il décrit la situation financière des régimes, apprécie les conditions de leur viabilité, propose des mesures de rééquilibrage, mène une réflexion sur le financement des régimes de retraites, formule des recommandations ou des propositions de réforme. Ses travaux sont publiés dans un rapport annuel. Le dernier date du mois de septembre 2022 (https://www.cor-retraites.fr/). Si la lecture de ses 342 pages émaillées de graphiques peut rebuter, les moins courageux ou les plus pressés pourront à tout le moins parcourir sa synthèse, édifiante à l’heure de la réforme engagée. En voici quelques extraits dont l’auteure de ces lignes espère qu’ils donneront aux lecteurs l’envie d’en savoir davantage.
« Sur la période 2021-2027, couverte par les prévisions du gouvernement établies dans le cadre du programme de stabilité, les dépenses de retraite dans le PIB seraient globalement stables. Elles passeraient de 13,8 % en 2021 à 13,9 % du PIB en 2027.
En revanche, de 2028 à 2032, la part des dépenses de retraite serait en hausse, pour atteindre 14,2 % pour le scénario 1,6% à 14,7 % pour le scénario 0,7 %. (…)
À plus long terme, de 2032 jusqu’à 2070, malgré le vieillissement progressif de la population française la part des dépenses de retraite dans la richesse nationale serait stable ou en diminution. Ce résultat peut sembler contre-intuitif au regard du vieillissement démographique attendu qui viendra inéluctablement peser sur les dépenses de retraite futures, en alourdissant le nombre de retraités relativement au nombre de cotisants. Cette évolution démographique défavorable est contrebalancée, d’une part par le recul de l’âge de départ à la retraite qui passerait de 62 ans à 64 ans du fait des réformes déjà votées ; et, d’autre part, par la moindre augmentation du niveau de vie des retraités relativement aux actifs. Du fait de l’indexation du système de retraite sur les prix, la pension moyenne continuerait de croître en euros constants, mais moins vite que les revenus d’activité moyens (qui bénéficient des gains de productivité en sus de l’inflation). Le niveau de vie des retraités rapporté à celui de l’ensemble de la population serait ainsi compris, en 2070, entre 75,5 % et 87,2 % contre 101,5 % en 2019. La stabilisation/diminution de la part des dépenses de retraite dans le PIB a pour contrepartie la diminution relative – et non absolue – du niveau de vie des retraités par rapport à l’ensemble de la population. (…)
À noter que le recul de l’âge de la retraite évoqué ici est la conséquence des réformes passées qui, en augmentant la durée de cotisation pour l’obtention du taux plein, incitent les travailleurs à retarder leur demande de liquidation de pension.
(…) les résultats de ce rapport ne valident pas le bien-fondé des discours qui mettent en avant l’idée d’une dynamique non contrôlée des dépenses de retraite. (…).
Sur les 25 prochaines années, le système de retraite serait en moyenne déficitaire, quels que soient la convention et le scénario retenus. À plus long terme, la situation financière du système de retraite dépendrait fortement de la convention et du scénario retenus. »
L’équipe de l’Institut du travail vous souhaite une belle année 2023, éclairée et éveillée. Soyez curieux !
Maryse Badel
Les commentaires
Le licenciement verbal : gare à ne pas aller plus vite que la musique ! note sous Soc, 28 Septembre 2022, n°21-15.605, FD et Soc, 28 Septembre 2022, n°21/15.606, FD
Fin septembre, la Chambre sociale de la Cour de cassation est revenue, à l’occasion de deux arrêts concernant une même entreprise, sur l’épineuse question du licenciement verbal.
Deux salariés avaient été licenciés pour faute grave par le biais de lettres de notification datées du 15 novembre 2016 et reçues le 16 novembre 2016. Cependant, la direction des ressources humaines de l’entreprise les avait contactés par téléphone le 15 novembre 2016, aux alentours de 17h45, pour les prévenir de la décision prise à leur égard et pour leur indiquer de ne pas se présenter au travail le lendemain.
Dans ces deux affaires, la Cour d’appel de Grenoble a considéré que le licenciement verbal était démontré à travers l’appel téléphonique concomitant à l’envoi du courrier par l’employeur, le 15 novembre 2016. La Chambre sociale de la Cour de cassation casse les deux arrêts d’appel, en développant le raisonnement suivant : « en se déterminant ainsi, sans rechercher si la lettre recommandée avec demande d'avis de réception notifiant la rupture du contrat de travail n'avait pas été expédiée au salarié avant la conversation téléphonique, de sorte que l'employeur avait déjà irrévocablement manifesté sa volonté d'y mettre fin, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ».
De jurisprudence établie, le licenciement verbal d’un salarié, qui a pour effet de rompre le contrat de travail, est dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 23 juin 1998, 96-41.688 ; Cass. soc., 22 mai 2001, n°99-40.486, Cass. soc., 12 novembre 2002, n°00-45.676). Appuyée sur l’actuel article L. 1232-6 du Code du travail, cette solution découle de l’obligation qui incombe à l’employeur de notifier par écrit le licenciement, la rupture du contrat de travail se situant à la date où l’employeur a manifesté sa volonté d’y mettre fin, à savoir la date d’expédition de la lettre de notification (par ex. : Cass. soc., 11 mai 2005, n° 03-40.650 et n°03-40.651, note Br. Reynès, D. 2006. 701).
Le licenciement verbal sera caractérisé par la preuve recevable (Cass. soc. 29 janvier 2008, n°06-45.814, concernant un enregistrement téléphonique réalisé à l’insu de son correspondant), rapportée par le salarié, que l’employeur a manifesté sa volonté de rompre le contrat de travail antérieurement à l’expédition de la notification écrite ou en l’absence d’une telle notification. La jurisprudence a ainsi considéré que peut constituer un licenciement verbal l’ordre donné au salarié de quitter l’entreprise, de cesser immédiatement son travail ou de ne pas reprendre le travail après une suspension (V. Roche, « Le licenciement verbal : une mesure irréversible », La Gazette du Palais, n°20, 2017, p. 66). Cela peut se matérialiser par une annonce orale, par exemple avant toute convocation ou lors de l’entretien préalable (Cass. soc., 10 avril 2008, n°06-46.181), par un appel ou un message vocal sur un répondeur (Cass. soc., 6 février 2013, n°11-23.738, note H. Barbier, RTD Civ., 2013, p. 380 ; J.-E. Tourreil, JSL, n°340, 28 mars 2013), ainsi que par un mail (Cass. soc. 25 septembre 2013, n°11-25.884, note M. Peyronnet, Dalloz Actualité, 16 octobre 2013).
L’employeur auteur d’un licenciement verbal se voit privé de la possibilité régulariser la procédure. La lettre de notification adressée postérieurement à cette annonce est ainsi sans effet sur l’illicéité du licenciement (Cass soc., 17 février 2004, n°01-45.659 ; Cass. soc., 9 mars 2011, n°09-65.441 et, plus récemment Cass. soc. 10 janvier 2017, n°15-13.007, note V. Roche, précitée, et A. Bonnet, JSL, n°426, 24 février 2017).
Dans une décision du 6 mai 2009, la Chambre sociale de la Cour de cassation avait eu à traiter de la situation d’un salarié qui n’avait pas reçu sa lettre de notification et qui avait été informé oralement de son licenciement en se présentant à son travail. En l’occurrence, la notification avait été envoyée deux jour avant cette annonce orale, mais, insuffisamment affranchi, le courrier n’avait pu être délivré et avait été retourné à son expéditeur. L’employeur avait dû finalement recourir à un huissier et la remise avait été faite peu après que le salarié se soit vu interdire l’accès à l’entreprise. La Chambre sociale avait alors considéré que la rupture ne s’en trouvait pas pour autant privée de cause réelle et sérieuse, puisque le licenciement verbal invoqué était intervenu postérieurement à l’expédition initiale de la lettre de notification, cette expédition traduisant par elle-même la volonté de l’employeur de licencier le salarié (Cass. soc., 6 mai 2009, n°08-40.395, note S. Maillard, Dalloz Actualité, 19 mai 2009 ; Fr. Favennec-Héry, Droit social, 2009, p. 818).
En ce sens, la détermination de la date et, pour les arrêts du 28 septembre 2022, de l’heure de l’expédition de la lettre de notification apparaît comme un élément essentiel pour la caractérisation d’un licenciement verbal. C’est la raison pour laquelle, sur le terrain du défaut de base de légale, la Cour de cassation reproche à la Cour d’appel de Grenoble de n’avoir pas fait cette recherche. Les arrêts du 28 septembre 2022 s’inscrivent donc en cohérence avec la jurisprudence de 2009, qui met l’accent sur la temporalité des faits. La Chambre sociale se refuse toutefois, comme elle y était invitée par les moyens développés, sur le terrain de la violation de la loi, à déduire par elle-même de la délivrance de la lettre de notification le 16 novembre 2016, que celle-ci datée du 15 novembre, aurait nécessairement été expédiée antérieurement aux appels passés le même jour vers 17h45.
Il appartient donc aux juges du fond, saisis d’une demande relative à un licenciement verbal, d’établir une chronologie précise des faits, afin de vérifier si l’annonce faite est bien antérieure à l’expédition de la notification du licenciement.
Alexandre Charbonneau
Chômage et refus de CDI : l'image déformée de la perte involontaire d'emploi. Art.2 de la loi n°2022-1598 du 21 décembre 2022 portant mesure d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi
Les nouveaux articles L. 1243-11-1 et L. 1251-33-1 du code du travail, issus de l’article 2 de la loi du 21 décembre 2022, introduisent un mécanisme visant à priver d’allocation d’aide au retour à l’emploi le salarié qui, au terme d’un CDD ou d’un contrat de mission, refuse la proposition de CDI que lui formule l’employeur. Les deux articles comportent quelques différences de rédaction.
Pour le CDD, l’article L. 1243-11-1 prévoit qu’au terme du contrat, l’employeur peut proposer par écrit au salarié de poursuivre la relation de travail, pour occuper le même emploi ou un emploi similaire pour une durée et une rémunération équivalentes, un lieu de travail et une classification identiques. En cas de refus du salarié, l’employeur informe Pôle emploi en justifiant du caractère identique ou similaire de l’emploi proposé. Pour le contrat de mission, l’article L. 1251-33-1 prévoit un mécanisme similaire lorsque l’entreprise utilisatrice propose au salarié un CDI pour occuper le même emploi ou un emploi similaire. L’emploi similaire ne doit impliquer aucun changement de lieu de travail, mais aucune précision n’est apportée s’agissant de la durée, de la rémunération et de la qualification du salarié.
Un nouvel alinéa est également ajouté à l’article L. 5422-1 I du code du travail. Ce texte prévoit que le salarié qui refuse à deux reprises, au cours des douze derniers mois, une proposition de CDI ne peut bénéficier de l’allocation de retour à l’emploi. Deux exceptions sont envisagées : lorsque le salarié est pluriactif, c’est-à-dire qu’il était employé en CDI sur la même période dans une autre entreprise ; lorsque la proposition de CDI n’est pas conforme aux critères formulés par son projet personnalisé d’accès à l’emploi, lequel doit avoir été établi avec Pôle emploi avant la date du dernier refus.
Les travaux parlementaires ayant abouti à l’adoption de ce texte sont d’une grande clarté. Contre l’avis du gouvernement et des oppositions, la majorité aidée du groupe Les Républicains au Sénat et à l’Assemblée nationale a entendu créer un dispositif de sanction des salariés qui refusent un contrat à durée indéterminée. Il faudrait pousser les salariés à accepter de conclure un contrat à durée indéterminée parce que les entreprises rencontrent aujourd’hui des difficultés à recruter (Dares Résultats n° 45, 8 septembre 2022). À l’analyse, cette mesure nous semble surtout destinée à briser l’évolution du rapport de force entre candidat à l’emploi et entreprise qui recrute. Parce que les entreprises manquent de main d’œuvre, les capacités de négociation du candidat à l’emploi ne lui ont jamais été aussi favorables depuis les années 1970. Cela sera désormais moins vrai lorsque le salarié achèvera un CDD ou un contrat de mission et qu’un CDI lui sera proposé.
Une procédure lacunaire
C’est bien de sanctionner dont il est question dans ces textes dont la philosophie s’appuie sur le fantasme du chômage volontaire, sur l’image déformée d’un salariat qui ne chercherait qu’à profiter des allocations pour alterner emploi et chômage (A. Fretel, B. Touchelay, M. Zune, Contrôler les chômeurs : une histoire qui se répète, Rev. fr. socio-économie, n° 20, 2018. 9). Le dispositif s’ajoute à celui de la privation d’indemnité de fin de contrat en cas de refus d’un CDI (privation qui ne concerne que le CDD, v. C. trav., art. L. 1243-10). La mesure copie celle applicable aux agents non titulaires de la fonction publique qui peuvent, depuis 2020, être privés d’indemnités d’assurance chômage s’ils refusent un renouvellement de contrat en CDD ou une proposition de CDI (art. 3 du décret n° 2020-741 du 16 juin 2020).
Les textes restent évasifs sur la procédure applicable qui sera précisée par décret. La proposition de CDI doit être formulée par écrit, sans que l’on sache pour le moment comment on pourra s’assurer que cet écrit a bien été communiqué au salarié. Le texte est totalement silencieux s’agissant de la forme requise pour refuser la proposition. Si le salarié ne répond pas par écrit, faudra-t-il considérer qu’il a implicitement refusé parce qu’il ne se présente pas au travail dans les conditions du CDI proposé ? Ne faudrait-il pas lui laisser un temps de réflexion afin qu’il soit en mesure de comprendre les conséquences d’un tel refus ?
Toujours sur le plan procédural, on peut légitimement se demander si le dispositif pourra fonctionner. Lors des discussions parlementaires, le ministre du travail a plusieurs fois insisté sur l’impossibilité de rendre opérationnel le dispositif de remontée de données à Pôle emploi à brève échéance. Plus généralement, le gouvernement était hostile à cette proposition qui ne figurait pas dans le projet de loi et a été ajouté par amendement sénatorial. Il ne serait donc guère surprenant que, pour des raisons techniques ou politiques, la publication des décrets d’application tarde, laissant le mécanisme en sommeil tant que le gouvernement ne les aura pas adoptés.
La proposition floue d’un « emploi similaire »
Les textes prévoient que la proposition de l’employeur ou de l’entreprise utilisatrice porte sur le même emploi ou un « emploi similaire ». Ces termes sont déjà souvent utilisés par le législateur s’agissant de la réintégration d’un salarié dans l’entreprise après une longue absence (congés parentaux ou familiaux, période d’activité partielle, mobilité volontaire sécurisée, etc.). Dans ces cas, l’emploi similaire doit toujours être assorti d’une « rémunération au moins équivalente », ce que prévoient également les nouveaux articles L. 1243-11-1. En revanche, rien de tel pour les intérimaires qui, si le texte est interprété trop strictement, pourraient être tenus d’accepter une offre de CDI comportant une rémunération inférieure…
Pour la proposition de CDI succédant à un CDD, le texte prévoit que l’emploi similaire doit « comporter une durée équivalente », ne doit pas impliquer de « changement du lieu de travail » et doit relever d’une « même classification ». Si ce dernier critère ne nous paraît pas poser difficulté, les deux premiers sont eux beaucoup moins facile à cerner.
Que faut-il entendre par « durée de travail équivalente » ? À l’évidence, il ne sera pas question de proposer au salarié à temps partiel de poursuivre en CDI à temps complet ou, à l’inverse, à celui qui était en CDD à temps complet d’être recruté en CDI à temps partiel. Le volume horaire doit être préservé. Mais doit-on craindre que d’autres changements soient admis sans modifier la « durée de travail » ? Le salarié qui travaillait selon un planning défini pour une durée hebdomadaire de 35 heures sera-t-il tenu d’accepter un aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine, sans changement global de volume de travail ? Un passage d’horaires de jour à horaires de nuit ? Une proportion de travail dominical ? À proprement parler, ces changements ne modifient pas la durée de travail qui reste équivalente. Ils constituent en revanche des modifications du contrat de travail au sens classique de ces termes, que le salarié est en principe toujours en droit de refuser. À condition d’admettre que le CDI proposé pourvoit le même emploi et organise la même relation de travail, le juge pourrait considérer que le refus du salarié en raison d’un de ces changements importants est justifié et qu’il ne devait donc pas être privé d’indemnisation.
Le même type d’interrogations s’élèvent à propos de l’identité de lieu de travail. Le texte est a priori clair et ne devrait donc pas être interprété : aucun changement de lieu de travail, y compris de quelques kilomètres, ne doit être proposé en même temps que le CDI, auquel cas le salarié pourrait refuser la proposition sans perdre ses droits à chômage. Il y a toutefois là une forme d’hypocrisie puisque l’on sait que le changement de lieu de travail dans le même secteur géographique constitue un changement des conditions de travail, relève du pouvoir de direction de l’employeur et peut donc être imposé au salarié. Malgré les apparences, la formule n’est donc guère protectrice. Un employeur pourra proposer un CDI sans changement de lieu de travail puis, une fois la proposition acceptée par le salarié, modifier unilatéralement ce lieu dans le même secteur géographique.
L’impasse sur les refus justifiés
La réforme comporte une lacune d’importance s’agissant de la justification du refus par le salarié. Le raisonnement des parlementaires ayant soutenu les amendements qui ont abouti à ces textes s’appuyait sur l’article L. 5422-1 du code du travail qui ne permet le bénéfice de l’allocation de retour à l’emploi qu’aux salariés « involontairement » privés d’emploi. De façon un peu simpliste, ils considéraient donc que, puisque le salarié a refusé un CDI, il n’a pas été involontairement privé d’emploi. Cette représentation de la volonté est erronée ou, à tout le moins, très partielle.
Contrairement à l’article 3 du décret du 16 juin 2020 applicable à la fonction publique, le nouvel alinéa de l’article L. 5422-1 ne prévoit aucune justification légitime au refus de CDI. Pourtant, certaines pertes d’emploi a priori volontaires peuvent en réalité cacher une privation totalement involontaire. C’est exactement pour cela que le règlement d’assurance chômage prévoit des cas de démissions légitimes, qui ouvrent droit à indemnisation alors que la démission, qui doit émaner d’une volontaire claire et non équivoque, est l’archétype de la perte volontaire d’emploi (Règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l’assurance chômage, art. 2).
Malgré cette lacune, deux issues paraissent envisageables. D’abord, le règlement d’assurance chômage pourrait être modifié par les organisations syndicales et patronales afin de prévoir que le refus d’un CDI dans certaines conditions ne prive pas le salarié d’indemnités. Il pourrait tout à fait être imaginé de recourir pour cela à la liste des causes qui permettent de rendre une démission « légitime ».
A défaut qu’une telle négociation soit menée, un contentieux pourrait naître devant les juridictions judiciaires afin de contester le caractère volontaire de la perte d’emploi dans certaines situations de refus. A l’image des raisonnements adoptés en matière de prise d’acte de la rupture du contrat de travail, il faudra alors identifier si le refus du salarié relève bien de sa volonté ou si le refus n’est pas en réalité imputable à l’employeur.
Sébastien Tournaux